Le 58ème Festival de San Sebastian Donostia

Lors de la cérémonie d’ouverture du Festival, le grand prix 2010 de la Fipresci, décerné au film The GhostWriter de Roman Polanski, a été reçu par l’actrice Olivia Williams, dans la très belle salle du Kursaal,

où avaient lieu la plupart des projections. L’autre moment fort de cette cérémonie a été l’hommage, rendu en français, de Goran Paskaljevic (président du jury international) à Claude Chabrol, enterré le matin même. Le film d’ouverture, Chicogrande de Felipe Cazals (Mexique) a été sans hésitation le plus décevant de la sélection, une évocation de Pancho Villa frisant le ridicule.

Dans la compétition officielle, beaucoup de morts violentes, notamment avec I saw the Devil de Kim Jee Woon (Corée du sud), 2h20 de meurtres insoutenables, des hectolitres de liquide rouge et d’interminables séances de tortures physiques : pourquoi un réalisateur si talentueux a-t-il besoin de racler ainsi les plus bas instincts de l’espèce humaine ? Pa Negre de Agusti Villaronga (Espagne) est une évocation de la fin de la guerre d’Espagne qui débute par un meurtre lui aussi très impressionnant, joli film néanmoins qui vaut à Nora Navas le prix de la meilleure actrice. Un suicide chez un vieux couple qui ne veut pas mourir grabataire, Satte Farben vor Schwarz, sujet très actuel traité par une jeune réalisatrice allemande, Sophie Heldman. Enfin violences sociales en Grande-Bretagne avec Neds de Peter Mullan, Concha d’Or 2010, ou comment la maladresse et l’ignorance des adultes peuvent engendrer le pire chez les enfants.

Pour souffler un peu, Genpin, le nouveau documentaire de la très talentueuse Naomi Kawase, prix de la Fipresci pour cette évocation d’une naissance sans violence. Avec les 4h30 de Misterios de Lisboa, Raoul Ruiz a embarqué les spectateurs dans une expérience surprenante de cinéma, du baroque dans lequel on met de la lenteur, des histoires à tiroir et en miroir. Amusant de sentir vibrer une salle pleine, un peu trop respectueuse dans la première partie et qui finit par rire aux éclats ou se laisser aller à pousser de grands soupirs d’exaspération à mesure que Ruiz déroule son ruban aux merveilles. Du côté de la contemplation, on vit Aita de l’espagnol José Maria de Orbe, poème graphique à une maison abandonnée, prix de la photo.

Dans les autres sections, le prix Kutxa du jeune réalisateur est allé à Carlos Cesar Arbelaez pour Los Colores de la montana, mais d’autres films méritent d’être signalés, comme Beautiful Boy de Shawn Ku (Etats-Unis) ou Chrest de Marcin Wrona (Pologne) qui, chacun avec un style très personnel, parlent d’une société en plein mutation où il est difficile d’avoir des repères ou des certitudes.

Mais un festival ne serait rien sans une vedette américaine et Julia Roberts, invitée d’honneur, présentait hors compétition, son dernier film Mange, prie, aime de Ryan Murphy. Conte de fées moderne où les jolies femmes peuvent manger des pâtes à volonté sans grossir, apprendre à méditer en Inde au milieu de compatriotes américains et trouver le mari idéal (tendre, disponible et riche) en Thaïlande. Elle est pas belle la vie, au cinéma ?

Le charme de San Sebastian, c’est aussi la mer, cet océan qui entre directement dans la ville. Le long des plages, véritables boulevards urbains, on peut méditer sur cet espace qui est à la fois la limite de la ville et le début de cet espace infini, toujours en mouvement, à la lumière changeante, aux reflets magiques. Spectacle parfait et toujours surprenant, comme du vrai cinéma dont on ne se lasse pas !

Magali Van Reeth

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